Miscellanée #7 : Septième art

 

Manifeste des sept arts, de Ricciotto Canudo, 1923Une septième miscellanée ne pouvait être que sur le septième art. L’expression est utilisée par tous ; mais d’où vient-elle ?

Depuis l’Antiquité les arts majeurs ont côtoyé les autres, mais ce n’est qu’au XIXe siècle qu’une “liste” a été officialisée. C’est le philosophe allemand Hegel qui distingue cinq arts, les classant par matérialité et expressivité : l’architecture, la sculpture, la peinture, la musique, la poésie. L’architecture constituant l’art le plus matériel et le moins expressif, la poésie le plus abstrait mais aussi celui qui fait le plus de place aux sentiments.
Hegel reconnaît qu’il existe d’autres arts, mais ils sont secondaires et “nous ne pourrons en parler que d’une manière occasionnelle”.

Mais Hegel, pauvre de lui, n’a pas connu le cinéma (il est mort une bonne soixantaine d’années trop tôt). C’est Ricciotto Canudo (1879-1923), intellectuel et critique italien, qui a pris la relève et complété, nouvelle technologie oblige, la classification des arts. Dès les années 1910, Canudo milite pour faire reconnaître le cinématographe comme sixième art, puis, lui laissant la place officieuse qu’occupait dans le coeur de beaucoup la danse, publie en janvier 1923 le Manifeste des sept arts dans lequel il proclame :

“Nous avons besoin du Cinéma pour créer l’art total vers lequel tous les autres, depuis toujours, ont tendu.”

Et affine ainsi la définition de Hegel, substituant au classement précédent la notion inédite d’art englobant, de méta-art : le cinématographe, septième art, englobe tous les autres puisqu’il les concilie et les sublime. Le cinéma forme un tout, à la fois matérialisé et doté d’une expression sans limite.

Immédiatement anobli par certains, décrié par d’autres, Ricciotto Canudo n’aura malheureusement pas vu sa théorie adoptée par tous dans le monde entier, puisqu’il meurt peu de temps après avoir apporté son auguste pierre à l’édifice cinématographique. L’expression a survécu à l’homme.

A lire : Ricciotto Canudo, Manifeste des sept arts, Séguier, 1923.

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