Hurlements
A Gérardmer, nos restaurants préférés n’ont pas mis la clé sous la porte depuis l’année dernière, les discussions avec les bénévoles (qu’on remercie, c’est en grande partie grâce à eux qu’on est là) vont bon train, et en plus il fait beau. Bref, le moral devrait être au beau fixe… Sauf que ce premier jour du 21e Festival international du film fantastique est marqué par une déception de taille : le « hurleur » anonyme qui réjouit les cœurs et hérisse les poils des spectateurs depuis que le monde est monde à chaque début de séance à l’Espace Lac est absent. A la place, un grand silence, puis quelques sifflements, une façon de respecter celui qui brille par son invisibilité (aucun rapport avec le thème du festival cette année).
Chaque début de séance, donc, est déceptif. Et pour l’instant, ce n’est pas la suite des événements qui va nous contredire. Mindscape, qui ouvre le festival cette année, jouissait pourtant d’un bel aura : le talentueux Mark Strong en détective-hypnotiseur, la starlette Taissa Farmiga, jeune sœur de Vera, qui a le vent en poupe depuis son rôle remarqué dans l’anthologie American Horror Story, et un réalisateur inconnu, Jorge Dorado, mais dont le nom hispanique renvoie inconsciemment aux plus belles productions horrifiques de ces quinze dernières années (pêle-mêle, on pense à La Secte sans nom et REC de Jaume Balaguero, à L’Orphelinat de Juan Antonio Bayona, aux Autres d’Alejandro Amenabar, et évidemment à l’ensemble de l’œuvre de Guillermo Del Toro). C’est dire l’impatience de découvrir le film. Un coup dans l’eau : Mindscape ne signe pas la naissance d’un nouveau cinéaste, mais se transforme plutôt en publicité de pacotille pour une société de production espagnole qui fait de l’œil aux Etats-Unis.
Guère mieux avec All Cheerleaders Die, dont on attendait pourtant beaucoup – ou au moins, beaucoup d’humour. Mais le remake du film de Lucky McKee (2001) par Lucky McKee (2013) ne passe pas le crash-test de la mise en scène : sur papier, l’histoire de pom-pom girls tuées par les mâles dominants de l’équipe de football du lycée et revenues d’entre les morts pour se venger promettait une variation sur le sexisme et un slasher jubilatoires. Sur l’écran, passée une hilarante séquence d’ouverture, on s’ennuie ferme : scènes trop longues, bavardages inutiles, effets spéciaux désuets, plans peu soignés… Il n’y a guère qu’une séquence d’orgasme collectif et une pom-pom girl en sous-vêtements qui écoute un cœur battre qui sauvent le film du naufrage. Trop tape-à-l’œil, pas assez second degré. Dommage.
On mentirait en disant que cette première journée constitue un échec complet : Dark Touch de Marina de Van fait un récit dérangeant assez efficace – dont on ne vous dévoilera pas l’intrigue, par sympathie pour vous. Rigor Mortis rend hommage aux films chinois de vampires des années 1980 et révèle chez le néo-réalisateur Juno Mak un sens de l’esthétique et de la tension certain. Critiques à venir.