Minuit à Paris, de Woody Allen

 

Marion Cotillard et Owen Wilson dans Minuit à ParisAh, Paris ! (Prononcer “Parisse”.) Ses places, ses cafés, son Moulin Wouge et ses voitures à la queue leu leu. « Quand on sait que Paris existe, je ne comprends pas qu’on puisse de son plein gré vivre ailleurs », rêve à haute voix Gil Penter, le nouvel héros de ce dernier Woody Allen joué par Owen Wilson.

Cet habitué des comédies romantiques plus ou moins graveleuses incarne ici un poète chaste en manque de reconnaissance – ou d’inspiration – l’un et l’autre allant de pair, présentant un écarquillement quasi permanent des paupières devant les incroyables aventures que lui réserve son séjour parisien.

Il y a de quoi… Au hasard des chemins empruntés un soir d’insomnie, notre héros se retrouve assis sur les marches de la place Dalida à Montmartre, transformée pour l’occasion en un carrefour féerique à la croisée de mondes spatiotemporels enchevêtrés. Perdu – ah, comme il est rare de pouvoir se perdre, condition sine qua non pour pouvoir se trouver ! -, il ne sait plus comment rentrer à l’hôtel où sa douce harpie, blonde et américaine avec qui il ne partage rien – sauf un goût pour la nourriture indienne, et encore, seulement les naan – ne va pas tarder à l’attendre. Les douze coups de minuit sonnent quand une voiture des années 1930 s’arrête à sa hauteur. Il est invité à monter. Début d’une aventure dans cette époque qui le fascine tant. Retour dans le temps.

Comédie romantique, conte fantastique, Minuit à Paris se regarde comme du petit lait sucré. Woody Allen y met en scène le fantasme de la nostalgie. A noter, ce phénomène étonnant que les artistes, à chaque époque, se retrouvent aux mêmes cafés, aux mêmes soirées. Comme si pour créer il fallait être ensemble, se disputer sur des détails parce que seule la création compte, vivre ensemble l’état d’inspiration permanente pour que chacun puisse se nourrir et donner libre cours à son imagination. L’art appelle l’art… Bref.

Gil Penter fait la connaissance de Picasso, Dali, Hemingway et toute la clique. Comique au début, l’effet de surprise a tendance à se répéter et seul Owen continue d’écarquiller les yeux à sa énième rencontre avec un personnage du passé, même s’il s’agit de Dali, glissé dans la peau du magnifique Adrian Brody.

Léger et agréable, ce retour dans le passé, bien que très esthétique et très romantique, pèche par un manque de renouvellement de ses ressorts narratifs. Les dialogues flottent, sont parfois cruellement creux, manquent d’incisif. Peu de quiproquos, de double sens. Manquent ces traits d’esprit piquants qui font toute la saveur d’un Woody Allen en forme. Ici, l’idée du retour dans le temps suffit à faire fonctionner le film. Les ingrédients – la fraîcheur de Marion Cotillard, Owen Wilson entre ciel et terre, Paris qui prend vie à ses plus belles époques – auraient pu prendre davantage d’allure. A noter : seul un maître comme Allen peut se permettre un scénario aussi moelleux en gardant le bon ton. Mais il reste en surface. Minuit à Paris est un divertissement en manque de nuances. Les Américains sont lourds, les Français charmants, les prémices des relations bien trop consentantes, fondées seulement sur un regard éloquent, les discours amoureux faussement beaux et bien trop conventionnels. Hélas. Clichés.

Reste Paris, filmé so glamour. Impossible de vivre ailleurs, il a raison Allen.

Minuit à Paris (Midnight in Paris), de Woody Allen, avec Owen Wilson, Rachel McAdams, Marion Cotillard… Etats-Unis, 2011. Sortie le 11 mai 2011. En sélection officielle hors compétition du Festival de Cannes 2011.

http://youtu.be/LApVrMdxdjk