Plateau télé : semaine du 12 mai

 

Tiens, ma télé a des oreillesAutant vous prévenir tout de suite, Cannes est la star de la semaine, et c’est sur Arte que ça se passe. Parce qu’Arte est la seule chaîne qui propose des films cannois en VM (ou en VO). Les autres font des efforts de programmation : Match Point, présenté hors compétition en 2005, sur France 2, Gomorra, Grand Prix du jury 2008, sur France 4, Munich et Il faut sauver le soldat Ryan, de Monsieur le président du jury, sur HD1 et France 4, ou Moulin Rouge !, en compétition en 2001, et alors que Baz Lurhmann fera cette année l’ouverture avec Gatsby le magnifique. Trop beau pour être vrai, vous ne pourrez voir ces films qu’en VF – ce qui est d’autant plus incompréhensible pour le multilinguisme de Munich, et les références aux paroles de chansons de Moulin Rouge !. En ces temps troublés, déclarons donc notre amour à l’amitié franco-allemande. Merci Arte.
 

Dimanche 12 mai

Bright Star, de Jane Campion – 20h45 – Arte
Rosetta, de Luc et Jean-Pierre Dardenne – 23h35 – France 4
Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas… mais elle cause !, de Michel Audiard – 20h50 – D8

Jane Campion reste aujourd’hui la seule femme détentrice d’une Palme d’or, pour La Leçon de piano. Elle recevra cette année le Carrosse d’or de la Quinzaine des réalisateurs, et présidera le jury des courts-métrages – dont elle a également obtenu la Palme d’or en 1986. La réalisatrice idéale avec qui commencer une semaine cannoise à la télé. Elle avait présenté Bright Star en compétition en 2009, une évocation délicate et romantique – au sens premier – de la vie du poète John Keats, interprété – pour les fans de The Hour – par le jeune débutant Ben Whishaw.

On enchaîne avec Rosetta, Palme d’or 1999, sur France 4. Pas de Festival de Cannes sans que les frères Dardenne traînent dans les parages. Le film a révélé Emilie Dequenne, qui était également repartie avec le prix d’Interprétation. Belle performance alors qu’on la voit principalement marcher de dos avec ses bottes. Surtout, elle était une pionnière des personnages féminins des frères Dardenne, femmes fortes qui se battent avec rage contre leur sort.

Question femme de caractère, on peut aussi retrouver avec plaisir Annie Girardot : Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas… mais elle cause ! Certes, Michel Audiard a plus souvent fait preuve de subtilité dans ses scénarios pour d’autres que dans ses propres réalisations, mais Annie Girardot reste.
 

Lundi 13 mai

Two Lovers, de James Gray – 20h50 – Arte
Les Chats persans, de Bahman Ghobadi – 22h35 – Arte

James Gray se surpasse cette année, puisqu’il présente deux films à Cannes : The Immigrant, qu’il réalise (en compétition), et Blood Ties, le film de Guillaume Canet dont il a écrit le scénario (hors compétition). A l’exception de Little Odessa, son premier, il a présenté tous ses films en compétition. Two Lovers, comme son nom l’indique, était son virage romantique, loin de la mafia et des flics. Pourtant, Joaquin Phoenix n’en est pas moins coincé par le cocon familial, pas moins pressé de fuir, pas moins pris entre deux feux. Romantique peut-être, mais la tension et le drame sous-jacent sont toujours là.

Les Chats persans, récompensé d’un prix spécial du jury Un Certain Regard en 2009, raconte Téhéran par le rock, et le milieu underground de ceux qui tentent, envers et contre tout, de faire de la musique sous la répression. Un cinéma clandestin, un cinéaste interdit. Au final, l’énergie du désespoir.
 

Mardi 14 mai

Mais qui a tué Pamela Rose ?, d’Eric Lartigau – 20h50 – NT1
Un ticket pour l’espace, d’Eric Lartigau – 22h25 – NT1

Dans cette semaine cannoise, parce qu’on craint le syndrome de Stendhal, on fait une pause comédie française avec la soirée Kad et Olivier sur NT1. On risque peu d’être ébloui, mais on regarde quand même, à l’affût de trouvailles aussi drôles que trop rares.
 

Mercredi 15 mai

Le Ruban blanc, de Michael Haneke – 20h50 – Arte
4 mois, 3 semaines et 2 jours, de Cristian Mungiu – 0h00 – Arte

Une soirée réservée aux gens qui vont bien. Parce qu’il faut avoir le coeur bien accroché pour les deux dernières Palmes d’or de la semaine : Le Ruban blanc, en 2009, et 4 mois, 3 semaines et 2 jours, en 2007. L’un évoque dans un noir et blanc oppressant les origines du mal, rien que ça, dans une Allemagne à la veille de la Première Guerre mondiale. Un village, l’innocence de l’enfance, la violence des croyances et des traditions. Et la vengeance et l’horreur. L’âpreté de Michael Haneke est un nouveau coup de maître.

Si l’on croit toujours malgré tout au genre humain, il faudra être sacrément bien armé pour supporter le récit d’un avortement clandestin dans la Roumanie des années 1980 par Cristian Mungiu. Les couleurs sont passées, mais la violence éclate, presque sourde. Elle est précédée de regards et de non-dits, mais tous comprennent. Cristian Mungiu filme une odyssée à l’issue inéluctable. Le temps file lentement, et pourtant il presse, il oppresse. Magistral.

 
Une fois n’est pas coutume, 66e Festival de Cannes oblige, à partir de jeudi et pendant toute la durée du Festival, Grand Écart suspend ses activités télévisuelles pour se plonger dans les salles obscures de la Croisette. Jusqu’au 26 mai, pas de plateau-télé, mais des critiques, des anecdotes, des photos du Festival international du film. En attendant l’ouverture de notre dossier complet au jour le jour, retrouvez l’ensemble des sélections officielles compétition et Un Certain Regard, ainsi que la sélection de la Quinzaine des réalisateurs.