C’est rigolo les journalistes à Cannes. On n’en est qu’au début, alors tout le monde est excité comme des puces, enthousiaste sur tout, et quand on n’aime pas un film, on ne crie pas au scandale, on dit juste que ouais ben bof, quoi. Et surtout, la Croisette est sous le charme de Matthias Schoenaerts, l’acteur de De rouille et d’os. D’ailleurs, on flaire un truc avec Ondine Millot. L’acteur belge a clairement tapé dans l’œil de la journaliste de Libé qui fait son portrait aujourd’hui (ici). Enfin, pour être précis, il lui a fait des clins d’œil, raconte-t-elle. Et elle s’en remet pas. Du coup, vas-y les « il est sensuel et sympathique », les « filmé au plus près du biceps », les « une peau où perle la sueur », et j’en passe. « Et nous voilà à détailler des yeux tout en discutant de son corps, comme si tout cela était bien normal », finit-elle par dire. Quand même. Au photographe des Inrocks (là), il dit “J’en ai marre qu’on me demande toujours de me foutre à poil !” Ah bravo, hein, ça commence bien ce festival.
Ca commence bien, c’est d’ailleurs l’avis général pour la Quinzaine, ouverte par Michel Gondry et des ados dans un bus (The We and the I). Unanimité. Filmé à l’énergie (dans Le Figaro), « festival de vannes » (dans Libé, toujours au-dessus du Figaro, niveau jeux de mots), « un ton festif, léger et généreux » (Le Monde), « du Gondry de haute volée » (Les Inrocks), « une singulière expérience de cinéma » (Télérama). N’en jetez plus. Ca se bouscule un peu moins pour parler du film de Lou Ye, mais ça dézingue mollement. Libé (ici) en profite pour dire que de toute façon, ça n’a jamais été tellement leur truc, le cinéma du dissident chinois, et qu’ils avaient bien raison : « Mystery ne bouleverse guère plus cette idée que l’on se fait de son talent qu’il ne devrait transporter les cinéflics pékinois d’exaltation. » Pour Télérama (là), c’est « très moyen pour ne pas dire médiocre ». Non, pour vraiment savourer un dézingage de film, il faut aller voir nos amis du Figaro (ici), qui ne se sont tellement pas remis de la merveilleuse phrase de Sarkozy lors du débat face à Hollande (« le meilleur moyen de faire des économies d’énergie, c’est de faire des économies d’énergie »), qu’ils nous la ressortent sous toutes ses formes à propos du film de Yousry Nasrallah, Après la bataille (un film qui parle de révolution, on dit ça, on dit rien). Des « idées originales et intéressantes », mais « ce qui est original n’est pas intéressant et ce qui est intéressant n’est pas original », et, le meilleur, « lorsqu’il galope en poussant des cris, il pousse des cris en galopant dans le désert ». Je vous laisse méditer là-dessus.