La Bande des jotas, de Marjane Satrapi

 

La Bande des jotas, de Marjane SatrapiAprès le film d’animation avec Persepolis, après le conte mi-figue mi-raisin avec Poulet aux prunes, Marjane Satrapi se jette à l’eau en signant sa première fiction réaliste… ou presque. La Bande des jotas est un film de transition. Tout en gardant un pied dans le dessin, son premier amour, Marjane Satrapi semble exprimer son profond désir de faire du cinéma. Alors elle se lance, se détache de ses romans graphiques et improvise. Elle jette en vrac tout ce qui lui passe par la tête. L’Espagne, la mafia et… le badminton. C’est improbable, absurde, un peu foutraque mais c’est surtout sans prétention, réalisé entre amis avec les moyens du bord, en toute liberté. Un trait de folie qui nous entraîne sur les routes d’Espagne dans un road movie meurtrier centré sur trois personnages : Niels (Mattias Ripa, coproducteur du film) et Didier (Stéphane Roche, coproducteur et monteur), deux amis venus participer à un tournoi de badminton, se retrouvent associés à une femme mystérieuse aux grosses lunettes noires (Marjane Satrapi elle-même) qui prétend être la cible d’un gang mafieux dont les prénoms commencent tous par un “j” (le “jota” espagnol). Niels et Didier acceptent alors de troquer leurs raquettes et leurs volants contre un flingue et un couteau pour jouer les tueurs à gages de fortune. On vous l’a dit, c’est absurde. Marjane Satrapi ne s’interdit rien. Le scénario, elle l’avoue bien volontiers, est souvent écrit la veille pour le lendemain. Mais quitte à s’égarer ici ou là, la réalisatrice préfère avancer à vue. Et c’est souvent tout droit, sans fioritures. Un peu comme son personnage, “tiers-mondaine” sans gêne légèrement barrée qui donne son avis sur tout. Sur “les prénoms de salopes”, sur les types maqués avec des Japonaises. “Soit ils ont des boutons, soit ils sont puceaux.” Sur les terroristes. “Moi je suis hyper pour les terroristes.” On ne sait pas qui est cette femme et on ne le saura jamais vraiment mais, comme Niels et Didier, on s’y attache et on la suit volontiers dans ce gloubi-boulga azimuté, quelque part entre Kaurismaki et Sergio Leone.

 
La Bande des jotas de et avec Marjane Satrapi, avec aussi Mattias Ripa, Stéphane Roche, Ali Mafakheri. France, Belgique, 2012. Sortie le 6 février 2013.