Un géant encore trop vert…
La jeune Barbara n’est pas qu’une adolescente à lunettes munie d’un serre-tête avec des oreilles de lapin. Non, elle pourfend également des géants de son marteau magique, baptisé du nom d’un ancien joueur de baseball. Du moins, le croit-elle dur comme fer. Car ni ses frère et sœur, ni sa nouvelle amie Sophia, ni ses camarades à la brimade facile, ni sa psychologue, ne daignent la prendre au sérieux. Aussi traîne-t-elle comme une carapace, le qualificatif de folle, qui lui permet, au mieux, d’être évitée par tout un chacun. Au pire, elle n’est pas à l’abri d’une rouste intempestive. Mais qu’importe ! Elle a le monde à sauver de ces géants malfaisants qui ne trouvent rien de mieux que de se confondre avec les arbres de la forêt…
Il a fallu plus de deux années et demie au réalisateur danois Anders Walter pour réaliser cette Chasseuse de géants, qui succède à Helium, Oscar du court-métrage en 2014. Courtisé par Hollywood, fasciné par le roman graphique éponyme de Joe Kelly et JM Ken Niimura, le réalisateur a emmené femme et enfant à Los Angeles pour tenter de développer ce projet d’envergure qui nécessite à la fois de grands élans d’émotion et des effets spéciaux impressionnants. Le film possède d’ailleurs toutes les qualités et les menus défauts des premiers longs-métrages : une envie de montrer son savoir-faire, un besoin de se mesurer aux plus grands (Guillermo Del Toro ne semble pas si loin), quitte à faire trop long et oublier au passage, entre une sincérité évidente de son propos, des pointes d’originalité…
Car Anders Walter passe après bien des films ambitieux sur l’enfance ou l’adolescence qui se réfugie dans l’imaginaire pour éviter de se plonger dans une réalité tragique. Il y a déjà eu, entre autres, L’Histoire sans fin, Donnie Darko, Le Labyrinthe de Pan et plus près de nous, Quelques minutes après minuit, un frère jumeau de cette Chasseuse de géants, en plus fort, vibrant et mieux maîtrisé. Si Anders Walter évite le copier-coller de justesse avec ce dernier, il souffre terriblement de la comparaison. Mais il a une arme qui le sauve malgré tout : non pas un marteau magique, mais une interprète saisissante pour le rôle ô combien difficile de Barbara. Physique, charismatique, émouvante, Madison Wolfe, 15 ans et ses déjà quatre années de carrière. A chaque fois, elle se plonge corps et âme, comme une grande, dans des prestations dramatiques marquantes : Conjuring 2, Joy ou encore Dalton Trumbo. Le géant Hollywood n’a qu’à bien se tenir…
Chasseuse de géants (I Kill Giants) d’Anders Walter, avec Madison Wolfe, Zoe Saldana, Imogen Poots, Sydney Wade… Etats-Unis, Belgique et Irlande, 2017. Présenté en compétition officielle du Festival du film fantastique de Gérardmer 2018.