Revenge, de Coralie Fargeat

 

Barbie tue Rick

Revenge, de Coralie FargeatRichard, que nous rebaptiserons Caliente (au sang aussi chaud que son pantalon quand il en porte) emmène dans une villa Air B’nB en plein milieu du désert marocain, sa nouvelle conquête du moment, Jennifer, alias Shakira pour ses racines décolorées et son légendaire déhanché. Ils passent leur temps à batifoler, nager dans la piscine et faire du rien. Jusqu’à l’arrivée de Michael Hanouna (tant Vincent Colombe qui l’incarne est un croisement entre Michael Youn et Cyril Hanouna) et de Gras Double (au physique appelé à mourir en premier dans d’atroces souffrances), ses amis et associés, qui contemplent Shakira et ses mini-bikinis, l’écume au bord des lèvres. Evidemment, tout ceci ne peut que mal tourner. Caliente absent pour la matinée, Michael Hanouna et Gras Double entreprennent de s’amuser un peu avec Shakira devenue subitement plus farouche. Et peu encline à partager ses miasmes avec les amis de son amant. Qu’importe, un viol plus tard, Shakira ne désire plus qu’une seule chose : rentrer chez elle au plus tôt. Caliente, à la sensibilité proche du cactus, ne l’entend pas de cette oreille et la laisse pour morte en plein désert. Mais l’est-elle vraiment ?

Si Revenge avait été réalisé par un homme, on aurait parlé de sexisme. Mais comme c’est le premier long-métrage d’une femme, on dira plutôt que c’est de féminisme qu’il s’agit. Car les plans placés au niveau de la croupe qui chaloupe de Shakira et sa propension à ne jamais porter de vêtements trop longs, pourraient porter à confusion. D’autant que la belle a tout de la bête aux premiers abords. Et qu’il suffit que ses cheveux se ternissent par la poussière et le sang, pour qu’elle se mette à réfléchir à vitesse grand V et se transformer en MacGyver. Mais voilà, c’est Coralie Fargeat, dont c’est le premier film, après des courts-métrages remarqués. Et elle n’hésite pas à dénuder Caliente et à en faire le même objet de fantasme, fesses en gros plan comprises. En revanche, à la différence de ses consoeurs qui se sont déjà risquées au film de genre plutôt gore, telles que Marina De Van ou Julia Ducourneau, ici, point de finesse : tout repose essentiellement sur le deuxième (voire troisième) degré. Pour mieux dénoncer ? Non, car ce qui aurait pu être un premier long nerveux et revendicateur, ne devient qu’une énième série B, vite consommée, vite oubliée. Les méchants sont très très méchants, jouent comme des acteurs de téléfilms produits par AB Production et les dialogues sont aussi effrayants que les scènes sont trash (un pieu enfoncé dans le corps de Shakira, symbole phallique bien appuyé au demeurant, une cautérisation à base de bière, des viscères enveloppées dans du film alimentaire ou un tesson de verre enfoncé profondément dans un pied). Le film est peuplé d’invraisemblances grand-guignolesques supposées volontaires, mais qui desservent le propos : une femme-objet qui préfère s’animer et s’affranchir de son image, qui se libère de la beauté plastique qui l’emprisonne. L’absence totale d’émotion, de compassion, de profondeur, font que peu à peu, on se désintéresse du sort de Shakira qui s’ensanglante et sanglote. On ne s’étonne même plus de la voir courir aussi rapidement qu’une voiture, une carabine à la main, en soutien-gorge et petite culotte. On est loin, très loin, d’un Kill Bill à la française. Revenge aurait pu être un tigre qui se révolte et ravage le cirque qui l’a emprisonné. Et il avait tous les ingrédients pour ce faire. Mais ce n’est qu’un chaton déçu de ne pas avoir eu assez de croquettes… Sans rancune, Shakira !

 
Revenge de Coralie Fargeat, avec Matilda Lutz, Kevin Janssens, Vincent Colombe et Guillaume Bouchède. France, 2017. Présenté en compétition officielle du Festival du film fantastique de Gérardmer 2018. Sortie le 7 février 2018.

Mots-clés : , , , ,