Cinéma. Documentaires. Séries. Télévision. Aux éditions Montparnasse, on envoie du lourd ! Et c’est très bon.
Les Anonymes de Pierre Schoeller avec Mathieu Almaric, Olivier Gourmet, Jean-Philippe Ricci, Karole Rocher…
Après l’assassinat du préfet Claude Erignac, le 6 février 1998 à Ajaccio, la Division nationale anti-terroriste (DNAT) arrête un groupe appelé les Anonymes. S’ensuivent 96 heures de garde à vue et une instruction judiciaire.
En 2011, Pierre Schoeller nous immergeait dans les arcanes du pouvoir avec son excellent Exercice de l’Etat. Avec Les Anomymes, nous traquons Yvan Colonna. Une chasse à l’homme à travers les mots qui s’échappent des multiples auditions. Ils connaissent tous Yvan. Ou peut-être pas. De toute façon, ils ne piperont mot.
Le cinéaste prend le temps de revenir à la fois sur la mort du préfet Erignac et sur la concurrence que se livrent les nombreuses factions indépendantistes. On comprend que la décision de tuer l’homme d’Etat naît davantage de la volonté de faire un coup plutôt que de défendre une idéologie. La mort d’Erignac, c’est l’histoire d’un braquage, ou quand l’histoire et les hommes tournent les talons pour ne plus rien regarder en face.
Les Anonymes m’a rappelé la justesse des points de vue sur notre société développés dans L.627 de Bertrand Tavernier. Jamais, nous ne sommes dans l’épate. Le film transpire le sérieux et la vérité. La véracité comme un coup de poing. Les acteurs et les actrices ne se ménagent pas pour donner du grain à moudre à notre réflexion sur cette affaire politico-judiciaire qui a défrayé la chronique. Jean-Philippe Ricci en Colonna est formidable. Juste et ambigu comme il faut.
Un film ultra-conseillé.
Made in France – l’année où j’ai vécu 100 % français de Benjamin Carle, Karine Dusfour et Benjamin Audour, avec la participation exceptionnelle d’Arnaud Montebourg…
Fini les interrogations et les grands discours politiciens : peut-on vivre 100 % français pendant une année ? Un jeune homme téméraire de 25 ans en a fait l’expérience, pour se rendre compte qu’il va devoir se passer de réfrigérateur pendant un an, qu’il n’y a plus qu’une entreprise de brosses à dents en France, et que son meilleur moyen de transport sera une vieille mobylette qui ne dépasse pas les 30 km/h (quand elle ne tombe pas en panne…) !
L’ex-ministre de l’Economie, Arnaud Montebourg, qu’on l’apprécie ou qu’on le déteste, marquera la Cinquième République comme l’homme qui a tenté d’inviter les Français à consommer français et ce, sans passer pour un gros réactionnaire. En effet, le défaut estampillé 100 % français bien connu, celui de cracher dans sa propre soupe, a fait son temps. Désolé, ma nature de chauvin revient au galop. En plus j’aime ça !
Benjamin Carle s’est dit « Et si je prenais Montebourg au mot ! Chez moi, je vire tous les produits étrangers et je vis une année entière sur le ‘made in France’, et seulement grâce au ‘made in France’. »
Commence alors le tour de France des produits bien de chez nous (une litanie somme toute assez courte). Quoi de mieux pour comprendre l’histoire de l’économie française que de faire le tour du propriétaire. Dans un premier temps, notre ami Carle peine à s’équiper, peine à s’habiller, peine à vivre comme Monsieur Toutlemonde, redevenu le citoyen lambda « sans chemise, sans pantalon » (Rika Zaraï).
Bon point, le doc nous donne les trucs et les astuces pour acheter français. En effet, il existe encore sur notre territoire des pôles de fabrication où des petites mains s’affairent sur des pulls et des costumes. Toutefois, nous comprenons rapidement que la production de biens et de marchandises a depuis longtemps fichu le camp.
L’auteur de Made in France en convient ; résistons ! La résistance, on connaît ! Une attitude 100 % française. Et puis, nous le savons en matière d’économie, la routourne tourne (Franck Ribéry, footballeur exilé en Allemagne).
Un documentaire drôle et très instructif.
Combatientes, série de Jerónimo Paz Clemente et Tomás de Las Heras avec Lucas Ferraro, Lautaro Delgado, Lucas Escariz…
1982, les îles Malouines.
Durant la dernière nuit des affrontements entre Argentins et Britanniques, Gustavo Rivera, un soldat argentin, est touché par une balle à la tête. Il survit mais souffre d’une perte de mémoire. Cinq ans plus tard, il tente de reconstituer cette période oubliée en reprenant contact avec ses anciens camarades. Tandis que ces derniers l’aident à se souvenir, il réalise que plus il en apprend, plus il est hanté par les fantômes de la guerre qui ne l’ont jamais véritablement quitté.
C’est ce que l’on appelle une série géopolitique classe qui s’attache autant à considérer les hommes que les événements. La guerre des Malouines n’est pas un conflit à la mode. On oublie trop souvent que les Argentins et les Britanniques se sont mis sur la tronche d’avril à juin 1982 pour un caillou gros comme un département français. Combatientes revient sur cette année terrible à coups de souvenirs et à coups de canon. On se rend compte à quel point cette guerre du bout du monde a horrifié toute une génération. Les hommes et les femmes des deux camps ont été saisis d’effroi par les décisions brutales de leur gouvernement respectif.
Combatientes est une œuvre de mémoire sur la mémoire blessée. Enfin, une série respectueuse qui transmet les faits historiques avec une finesse psychologique peu commune.
A Young Doctor’s Notebook et autres histoires de Robert Mckillop avec Daniel Radcliffe, Jon Hamm, Adam Godley, Margaret Clunie, Rosie Cavaliero & Vicki Pepperdine …
Fraîchement désintoxiqué et retrouvant un certain goût à la vie, le docteur Mikhaïl se souvient de l’année 1918. Une année marquée par la guerre civile qui s’amplifie et se rapproche de l’hôpital où il est toujours mobilisé. Alors même que sa consommation de morphine devient un véritable problème pour lui et son entourage, le jeune médecin tombe sous le charme d’une jeune et belle aristocrate, Natasha…
Cette série en huit épisodes adaptée de la jeunesse de Mikhaïl Boulgakov vous saigne à vif. Il faut se lever tôt pour dénicher un programme court (chaque épisode dure une vingtaine de minutes) qui, autant sur le fond que sur la forme, donne autant. Une folie. Cet hôpital planté en pleine campagne abrite les âmes baroques des illustres gens de la ville et des plus rustiques paysans. On y croise des patients à bout de nerf, un personnel hospitalier retors, des soldats perdus, une bourgeoisie insouciante. On se surprend à rire devant les scènes gore où le jeune médecin tente de faire ses preuves pour faire oublier l’ancien maître des lieux. C’est alors qu’intervient un jeu temporel où le vieux docteur Mikhaïl (incarné par Jon Hamm) conseille le jeune docteur Mikhaïl (incarné par Daniel Radcliffe). Les répliques fusent, les situations burlesques s’enchaînent, on reste sur le flanc par tant d’audace. Jon Hamm et Daniel Radcliffe se donnent à fond en docteurs dépassés par les événements. Le soin apporté à l’image et aux décors fait pour beaucoup à la réussite de l’entreprise. Le grain rappelle les grandes heures du cinéma horrifique des années 1960/1970. On pense au Bal des vampires, aux œuvres du studio Hammer, à Sleepy Hollow, à Guillermo Del Toro, à Paradjanov, à Klimov et Tarkovski.
Une série tempétueuse hautement recommandée.
Saison 1 et saison 2 disponibles.
Coffret Apostrophe – Bernard Pivot
Diffusée en direct tous les vendredis soir sur Antenne 2 du 10 janvier 1975 au 22 juin 1990, cette émission littéraire de référence a marqué 15 ans durant l’histoire du petit écran et notre mémoire affective encore aujourd’hui. Sans doute Bernard Pivot savait-il orchestrer les débats avec ingéniosité et ses 5 invités à chaque plateau s’exprimaient librement, parfois au risque du direct.
Amoureux du cinéma, vous serez aux anges de retrouver sur un même plateau autour d’une conversation à bâton rompu Marcello Mastroianni, François Truffaut et Roman Polanki. Mastroianni nous raconte Federico Fellini, sa folie créatrice, sa bonhomie et son intelligence. Truffaut raconte Hitchcock, ses œuvres les plus marquantes, sa technique, ses égéries et Hollywood. Polanski raconte son enfance, ses débuts, ses succès et ses malheurs. C’est un bonheur à voir et à entendre.
Les autres DVD ne sont pas moins formidables avec des intervenants tout autant prestigieux.
Un coffret vintage à haute teneur en culture.
Et aussi… le prix Albert Londres 2014
La Guerre de la polio, documentaire de Julien Fouchet, Sylvain Lepetit et Taha Siddiqui…
Pratiquement éradiqué de la planète, le virus de la poliomyélite reste endémique dans les zones tribales de l’Afghanistan et du Pakistan, les talibans refusant l’accès aux équipes de vaccination. Le reportage suit les médecins et membres des ONG qui risquent l’enlèvement ou la mort pour sauver des vies. Ils doivent lutter contre la propagande des extrémistes qui diffusent les rumeurs les plus folles, mais aussi contre les conséquences d’une fausse opération de vaccination organisée par la CIA pour récolter l’ADN d’Oussama ben Laden.
Le documentaire pose un constat clair. Les talibans préfèrent que les enfants du pays crèvent lentement plutôt qu’une équipe de médecins infidèles démarre une campagne de vaccination. Les talibans ne croient pas en Dieu, ils aiment le fric, distillent la peur et cultivent la théorie du complot contre le grand Satan américain. Ainsi, ils règnent en maître préparant une nouvelle génération d’infirmes. Ils sont une poignée d’humanitaires à oser défier ces démons en arme. Ces infirmiers courageux passent de quartiers en quartiers au péril de leur vie, protégés par les habitants ou un chef tribal désespéré d’entendre dans les rues de son village les cris d’enfants malades.
La polio se répand et à l’autre bout du monde, la terreur ne faiblit pas.
Quartier Shit, reportage de Philippe Pujol. « Prix de la presse écrite »
Tout n’est qu’une question d’enfermement, dans une cité, dans un réseau de stups, dans une addiction, dans le chômage, dans la misère. Et comme tous les enfermés, ils rêvent d’évasion, grâce à la drogue, l’alcool, la délinquance, l’achat compulsif, l’ambition. Cette enquête en dix épisodes cherche à comprendre comment les habitants des quartiers populaires semblent prisonniers d’un contrôle politique puissant bien que sans cesse improvisé.