On le sait, le système des studios américains fait bien peu de cas des auteurs, qu’ils soient réalisateurs ou scénaristes. Ces derniers sont engagés par le studio, plutôt que l’inverse. Du coup, ce n’est pas parce qu’on sue sang et eau sur un film qu’on en a la maîtrise. Et on engendre un monstre. Pour renier leur progéniture, les réalisateurs ont décidé de ne pas la reconnaître et d’utiliser le nom générique d’Alan Smithee, pseudonyme signifiant que le résultat final ne correspond pas à leur vision artistique du film. La première fois, c’était en 1968, sur le film Death of a Gunfighter. Le premier réalisateur est viré en cours de tournage. Le second refuse de s’en attribuer la “gloire”. La Directors Guild of America décide alors que le film ne reflète le travail d’aucun des deux réalisateurs et invente le nom d’Alan Smithee. Au fil du temps, le pseudonyme est devenu synonyme de conflit sur le tournage, de dépossession d’une oeuvre, voire de doigt d’honneur à l’industrie. Une private joke connue des seuls initiés. Jusqu’à ce que trente ans plus tard, la MGM ne brise le tabou en sortant An Alan Smithee Film : Burn Hollywood Burn. Le pitch ? Un réalisateur du nom d’Alan Smithee veut désavouer son film, mais ne peut pas utiliser le seul pseudo autorisé par la DGA en pareil cas, puisque c’est son vrai nom. Depuis, Alan Smithee n’est plus. Le réalisateur protéiforme assumerait la paternité d’une vingtaine de films, d’une dizaine de versions coupées pour la télévision (parmi lesquelles ‘Dune’ de David Lynch ou ‘Heat’ de Michael Mann), et même d’épisodes des ‘Simpson’ ou de ‘MacGyver’.
Miscellanée #4 : Qui es-tu Alan Smithee ?
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– 13 avril 2011