C’est un vent de liberté qui souffle sur la télé cette semaine. La révolte des mineurs de Germinal, la provocation de Whoopi Goldberg en planque chez les bonnes sœurs, la figure iconoclaste de Sharon Stone dans un western signé Sam Raimi (Mort ou vif)… ok. Mais c’est surtout la fuite en avant de Belmondo dans A bout de souffle et la naissance de la Nouvelle Vague ou le souffle du jazz et du Swinging London à venir dans Une Education qui nous feront allumer la télé.
Hors de prix, de Pierre Salvadori – dimanche, 20h45 – France 2
Parce que Pierre Salvadori a donné à Jean Rochefort l’un de ses plus savoureux rôles (“His name is Victor Meynard, and he is a professional killer”), et à Guillaume Depardieu une troublante déclaration d’amour (“Tu m’émeus (…) quand je suis à côté de toi, j’me dis qu’il faudrait que je prenne un bain“), on est prêt à tout lui pardonner. Même si Hors de prix n’atteint jamais les cimes de Cible émouvante et des Apprentis. Même s’il semble avoir perdu en route son talent pour les dialogues cyniques et percutants, pourtant parfaitement adaptés à ces deux personnages qui se vendent pour une vie de luxe. Pierre Salvadori a tout de même conservé son sens du rythme, enlevé et efficace, et surtout son sens du casting. La gouaille d’Audrey Tautou et la timidité maladroite de Gad Elmaleh se mêlent avec bonheur. Mais sans faire les étincelles qu’on attendait.
Casque d’or, de Jacques Becker – dimanche, 20h45 – Arte
Arte conclut son week-end consacré à la Belle Epoque avec une plongée entre Belleville et les guinguettes de Joinville-le-Pont, en compagnie des Apaches, ces malfrats des faubourgs parisiens, pour une passion dévastatrice entre Simone Signoret et Serge Reggiani. Des rivalités, des stratagèmes, un nombre conséquent de gifles, tout ça pour les beaux yeux de Casque d’or, et sous le regard impressionniste de Jacques Becker.
Une éducation, de Lone Scherfig – lundi, 20h50 – Arte
Habitué des adaptations littéraires – on attend d’ailleurs cette année celle de A Long Way Down (Vous descendez ? en VF), avec notamment Aaron Paul, l’inoubliable Jesse Pinkman de Breaking Bad –, l’écrivain Nick Hornby, auteur entre autres de High Fidelity, se lance ici lui-même dans l’adaptation d’une nouvelle. L’histoire autobiographique d’une jeune femme qui tombe amoureuse dans l’Angleterre corsetée des années 1960. L’occasion de mêler son talent pour la description des sentiments et son regard amusé sur une société à l’aube de la révolution culturelle qu’elle connaîtra quelques années plus tard. Un conflit de génération conté avec un humour subtil et sarcastique, et une légère dose de discours féministe. Le tout bercé par le jazz, la voix de Juliette Gréco, le regard mutin de Carey Mulligan et le charme de Peter Sarsgaard.
A bout de souffle, de Jean-Luc Godard – mercredi, 20h50 – Arte
Jean Seberg, les cheveux courts, arpente les Champs-Elysées en vendant l’International Herald Tribune à la criée, avec son délicieux accent américain. Une séquence qui appartient résolument au passé, le journal ayant récemment troqué son titre pour un nom plus proche de la maison mère, l’International New York Times. Le charme d’A bout de souffle n’en est que plus renforcé. La liberté de Belmondo, jeune loubard en fuite, est aussi celle de Godard. Qui ambitionne, avec succès, de révolutionner le cinéma, simplement en descendant dans la rue, sans filet et avec l’insolence du débutant. La simplicité de la démarche alliée aux effets d’un montage plus complexe et, sans doute, la classe inégalable de Jean-Paul Belmondo déclamant les aphorismes, dont on sait depuis Godard amateur, ont fait le reste. L’élégance, c’est de terminer un film sur cette question entêtante : Qu’est-ce que c’est dégueulasse ?
Et profitez du week-end pour retourner voir les meilleurs films de 2013, et ceux sortis pendant les vacances : Tel père, tel fils et I Used to be Darker, qui ne sont pas moins bons.