Les requins au cinéma

 

Requinquez-vous !

Sharknado, d'Anthony C. FerranteA l’heure où les requins croquent du touriste pour subsister, Grand Écart fait le point sur ces films où des squales de plus en plus gigantesques et transgéniques font plus rire que peur. Requins volants, requins des sables ou à deux têtes, ils ne manquent pas de mordant pour régaler nos zygomatiques. Plongez dans les eaux troubles du nanar estival !

 
Cher Steven Spielberg, en tournant Les Dents de la mer, pensiez-vous au mal que vous alliez insuffler à la fois dans les océans (le requin est devenu l’ennemi public numéro un des baigneurs et on le pêche par dizaine de millions chaque année) et dans les salles obscures ? On ne compte plus, désormais, le nombre de navets, pardon, de films, qui reprennent jusqu’à plus soif la peur du grand méchant blanc, avec plus ou moins de bonheur. Heureusement, ces (trop) longs-métrages parviennent peu souvent sur grand écran, mais surgissent dans les vidéoclubs, au point de susciter une attente de ces nanars honteux, de la part de spectateurs avides de mâchoires qui lacèrent de la bimbo. Et ce n’est pas le dernier-né, Sharknado, qui a créé son petit buzz au moment de sa première diffusion américaine (300 000 tweets !), qui dira le contraire. Pensez donc : des tornades qui emportent avec elles des requins affamés dans les rues de Los Angeles !

On peut ainsi relever six types de films de requins, aussi tordants qu’affligeants : celui qui tente d’être un peu réaliste, le requin génétiquement modifié, le requin qui se bat avec d’autres créatures, le film catastrophe avec du requin dedans, le megalodon (l’ancêtre géant du grand blanc) ou le requin qui n’est pas supposé être là. Et parfois, ils se mélangent tous en un joyeux bain d’inculture.
 

Catégorie « On dirait un vrai requin »

Commençons donc par le commencement : 1975, Les Dents de la mer, ou Jaws (« Mâchoires ») en VO, issu du roman de Peter Benchley, bien plus sanglant que sa transposition cinématographique. Spielberg distille la peur au compte-goutte, avec un requin mécanique dont on ne voit souvent que l’aileron, avant de l’admirer enfin lors de scènes d’anthologie. Si les effets spéciaux étaient du dernier cri à l’époque (et ont provoqué bien des sueurs froides au réalisateur, Bruce, le petit nom du requin-automate, n’étant pas toujours très coopératif), aujourd’hui, à l’ère du tout-numérique, on en rirait. Mais en 1975, les spectateurs hurlent dans la salle et on ne peut désormais plus écouter le générique du 20h de TF1 sans relever les jambes de son canapé de crainte d’être dévoré. Qu’à cela ne tienne, le succès du film a un tel retentissement que d’autres réalisateurs en veulent aussi leur part. Ainsi le réalisateur italien Enzo G. Castellari qui sort en 1981, La Mort au large, véritable copier-coller version fauchée des Dents de la mer 1 et 2.

N’oublions pas de mentionner les trois volets suivants du film de Spielberg, tournés par des maîtres d’œuvre oubliés depuis, avec un requin vengeur (en 3D dans le troisième du nom), mais de plus en plus anorexique (ainsi, dans Les Dents de la mer 4, on ne relève que deux petits morts seulement). En revanche, quand il s’agit d’histoires vraies, on frémit d’autant plus, comme avec Open water : en eaux profondes, où deux plongeurs oubliés vont devoir cohabiter avec des squales un peu taquins, sans y parvenir. Initiant ainsi toute une série de films donnant l’impression qu’il s’agit là encore de la réalité, comme l’australien The Reef en 2011 et ses adolescents perdus en pleine mer après un naufrage.
 

Catégorie « Requin transgénique »

Alors que dans les années 1990 les films de requins, un peu ringardisés avec l’échec compréhensible des Dents de la mer 4 en 1987, laissent un peu de répit à la peur de l’incroyable bête des mers, Renny Harlin que l’on n’a jamais connu subtil, tente de remettre l’aileron à la mode avec Peur bleue en 1999. Echec critique et commercial, le film a le mérite de faire rire volontairement avec des requins devenus ultra-intelligents après avoir subi des expériences génétiques, afin de développer un remède contre la maladie d’alzheimer. Le film est ainsi une tuerie dans tous les sens du terme, car toutes les têtes d’affiche meurent les unes après les autres, dont Samuel L. Jackson le premier. Et il ouvre la boîte de Pandore à des films qui sortent directement en DVD où le requin, fruit de la science, va devenir encore plus gourmand de chair humaine. Ainsi, que diriez-vous d’un mutant mi-homme, mi-requin, évoluant ainsi aussi tranquillement sur terre que sur mer ? Impossible ? Ce n’est pas ce qu’en pense Michael Oblowitz avec Sharkman, dont la bande-annonce vaut son pesant…

Mais peut-être préférez-vous le croisement entre un requin et une pieuvre dans Sharktopus, petit bijou d’effets spéciaux particulièrement ratés :

A noter que les films de cette catégorie et celle des suivantes, sont concoctés selon une recette immuable : un réalisateur de seconde zone, des acteurs de série qui tentent un énième come-back (on pense notamment à Corin Nemec, Lorenzo Lamas, Carmen Electra…), des jeunes freluquets imberbes et musclés et de plantureuses blondes siliconées qui se galochent avant de périr broyés par une mâchoire géante. Ou deux, comme dans le délicieux L’Attaque du requin à deux têtes qui comme son nom l’indique raconte l’histoire d’un requin doté de… deux têtes.


 

Catégorie « Requin versus »

Dans ces films de série Z, le requin ne pense qu’à une seule chose : manger. Mais pas seulement des humains. Il affronte également d’autres monstres de sa catégorie. En général, le requin en question est préhistorique et affronte tantôt des pieuvres géantes (Mega Shark VS Giant Octopus) ou des crocodiles gigantesques (Mega Shark VS Crocosaurus). Il n’oublie pas pour autant de faire sa fête à des plongeurs de passage. Ou même à un avion tout entier (en sautant pour l’atteindre, tant qu’à faire)… Nous ne résistons pas à vous diffuser cet extrait succulent d’effets spéciaux du pauvre de Mega Shark VS Giant Octopus. Admirez le jeu des acteurs et l’ambiance post-apocalyptique qui se dégage :


 

Catégorie « Film catastrophe avec des vrais morceaux de requin dedans »

Vous aimez les films où la nature se déchaîne et détruit les plus grandes villes américaines ? Vous raffolez des films de requins ? Pourquoi ne pas mêler les deux en un ? C’est ce que s’est récemment dit Anthony C. Ferrante, réalisateur de Sharknado. Le pitch est simple : des puissantes tornades gorgées des plus grands requins blancs et on abat le tout sur Los Angeles, avec pour héros Ian Ziering de Beverly Hills et Tara Reid d’American Pie. Requins qui volent toute gueule béante, requins tronçonnés, il y en a pour son argent. Une suite est d’ailleurs prévue. En attendant, lisez notre critique de Sharknado.

Les tsunamis sont aussi de bons pourvoyeurs de requins. Malibu est ainsi envahie de requins pèlerins affamés suite à une bonne grosse vague qui a déferlé sur la ville dans Malibu Shark Attack (on appréciera le titre original) quand Bait joue les eaux montantes dans des maisons avec option requins.
 

Catégorie « Megalodons le retour »

Une rumeur qui revient comme un boomerang assure que les megalodons, ancêtres du grand blanc, existeraient toujours. Cette théorie, appuyée par des dents non fossilisées de ce prédateur retrouvées récemment, a surchauffé les esprits de scénaristes farfelus. Et voici Shark Attack 1, 2 et 3 (carrément) et son megalodon amateur de bateaux entiers.

Mais pourquoi ne pas imaginer un ancêtre plus terrifiant et improbable ? C’est le cas de Dinoshark, en 2011, qui nous propose un requin mi-megalodon, mi-T Rex, réveillé de ses ténèbres pour engloutir de l’humain…


 

Catégorie « Euh, ce requin, là, c’est normal ? »

Certaines espèces de requins, comme le requin-bouledogue à la Réunion, peuvent vivre en eaux douces. Qu’à cela ne tienne, si on en mettait tout un banc dans Shark 3D, teenage movie où les adolescents servent de casse-croûte dans un lac pas si calme que ça. Mais nous avons mieux. Quatre chefs-d’œuvre à se mettre sous la dent. Le premier, Sand Sharks, avec Corin « Parker Lewis » Nemec, propose des requins qui vivent… sous le sable. Oui, oui, sous le sable.

Le second, Snow Shark se passe quant à lui en hiver, avec un aileron qui fend la neige comme la brise du matin :

Le troisième, avec Stephen Baldwin, se passe… à Venise. Dans Shark in Venice, le requin dévore du touriste et nous gondole de rire…

Le dernier, Ghost Shark, daté de cette année, tente même d’insuffler un peu de fantastique avec un requin qui parvient à apparaître dans une piscine ou bien dans une baignoire :

La liste est malheureusement non exhaustive. On relève ainsi une trentaine de films, téléfilms, blagues cinématographiques à base de squale. Et aucun n’arrive à la nageoire des Dents de la mer. Mais pour les vrais amateurs de requins, ne manquez pas Les Seigneurs de la mer, documentaire édifiant de Rob Stewart sur la disparition future de ces majestueux poissons et ses conséquences sur notre environnement. Et ça, c’est nettement moins drôle…

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